2 février 2021
L’innovation est au cœur de toute activité entrepreneuriale dans la mesure où l’entrepreneuriat est « un processus par lequel les individus créent des possibilités d’innovation ». ¹
Que ce soit dans l’imaginaire collectif ou dans l’écosystème entrepreneurial, le terme « innovation » est souvent associé, voire limité au domaine technologique. Cet amalgame a de nombreuses répercussions au niveau des programmes d’aide financière et d’accompagnement, ce qui pénalise notamment les femmes « qui innovent dans un spectre beaucoup plus large » ² et restent sous-représentées dans le monde des TI, comme nous le verrons dans la suite de l’article.
Par ailleurs, de plus en plus, partout dans le monde, l’équité, la diversité et l’inclusion (EDI) apparaissent essentielles au développement des entreprises et à l’innovation. Véritable levier de transformation des organisations, l’approche EDI favorise la transformation managériale, l’innovation sociale ainsi que les transitions sociétales.
L’innovation a donc tout à gagner en devenant plus inclusive, non seulement en ouvrant l’univers des TI aux femmes, aux minorités de genre et aux personnes issues de la diversité, mais également en se dotant d’une définition plus vaste.
L’écosystème de l’innovation technologique reste encore de façon significative peu accessible aux entrepreneures. De manière générale, l’univers des start-ups et le monde de l’innovation technologique se caractérisent par une « culture bro ».
Alors que les incubateurs et accélérateurs technologiques sont des maillons clés de l’innovation au Québec, « il est amplement démontré que la plupart ne sont pas des lieux accueillants pour les femmes entrepreneures et qu’ils maintiennent un statu quo favorable aux hommes blancs. » De par leurs politiques, leurs processus de sélection et leurs cultures organisationnelles, ces lieux ne favorisent généralement pas l’accès et l’intégration des femmes et des personnes issues de la diversité.³
Cette sous-représentativité a une incidence majeure pour l’innovation même. Il est primordial de prendre en compte le genre et la diversité dans les protocoles de recherche, d’ingénierie et de développement, au risque de développer des produits et services qui ne sont pas adaptés pour une partie de la population.
Le domaine des sciences et technologies est loin d’être exempt de préjugés et de biais sexistes. Le plus souvent, c’est le corps ou le caractère masculin qui sert de référence et constitue le principal sujet d’étude. Un très grand nombre de techniques ou d’inventions ont ainsi été mises au point selon des critères exclusivement masculins. Dans le domaine de la santé et de la sécurité, cela peut avoir des conséquences dramatiques.⁴
De même, en ce qui concerne l’intelligence artificielle, si celle-ci représente une opportunité pour le développement responsable de nos sociétés, elle pose aussi des questions éthiques importantes, notamment en termes de discriminations fondées sur le genre, la race ou tout autre critère identitaire. La perspective de genre et de diversité doit constituer un paramètre crucial pour assurer que les stéréotypes sociaux et culturels ne soient effectivement pas reproduits dans les programmations.
Les femmes entrepreneures et les entrepreneur.e.s issu.e.s de la diversité font naître de nouvelles idées, de nouvelles approches. Leurs activités entrepreneuriales sont des contributions importantes, qui participent pleinement, non seulement, à la croissance économique, mais au bien-être social de la société dans son ensemble.
En réalité, l’innovation va bien au-delà du monde technologique. Elle se traduit notamment par le développement de nouveaux produits et services, par l’émergence de nouveaux processus d’embauche, par l’ébauche de nouvelles méthodes de marketing et de vente, ou encore par la création de nouveaux modèles d’affaires.
L’innovation sociale, quant à elle, est un pan non négligeable et ô combien essentiel pour les sociétés. Elle répond à une nécessité d’améliorer des pratiques sociales ou organisationnelles ou d’en créer de nouvelles. Elle vise à trouver des solutions à des problématiques sociales et/ou environnementales complexes en tenant compte et en impliquant les communautés concernées. Il s’agit donc d’un processus de développement social intégrant la participation et la coopération des différentes parties prenantes. Selon le Réseau québécois en innovation sociale (RQIS), « la portée d’une innovation sociale est transformatrice et systémique. Elle constitue, dans sa créativité inhérente, une rupture avec l’existant. »⁵
Les femmes sont des actrices particulièrement importantes de l’économie et l’innovation sociales, en ce sens leur apport à la société est pleinement déterminant.
Favoriser une innovation inclusive permet de reconnaitre à juste titre l’apport des un.e.s et des autres, de promouvoir les femmes en tant qu’innovatrices et entrepreneures, de valoriser le caractère social et responsable des innovations, de les inscrire dans une démarche de développement durable et de prendre en compte la dimension de genre et de diversité pour réduire les inégalités et répondre ainsi aux besoins de tout le monde.
¹ [PCFE, État des lieux de l’entrepreneuriat féminin au Canada 2020, p.17.] ² [Conseiller, Les innovations des femmes entrepreneures peu reconnues] ³ [PCFE, État des lieux de l’entrepreneuriat féminin au Canada 2020, p.21.] ⁴ [OMPI Magazine, Faire progresser l’innovation en intégrant la dimension de genre] ⁵ [RQIS, Qu’est-ce qu’une innovation sociale?]
Passionnée d’ écriture et de voyage, de découverte et de partage, Morgane aime apprendre et explorer en permanence, découvrir de nouvelles cultures, de nouveaux espaces, de nouvelles façons de réinventer le monde qui nous entoure. Résolument curieuse, elle s’intéresse à des sujets variés, allant de la culture aux nouvelles technologies, en passant par l'innovation sociale et l’entrepreneuriat. Diplômée d’un Master en histoire du genre, elle porte un regard particulier aux problématiques femmes/hommes.